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10 nov. 2011

Cinquième lettre de Fanny à Constance

Ma très chère Constance,

J'ai bien reçu votre dernière lettre, ainsi que votre colis et je vous remercie de tout cœur d'avoir pensé à mon anniversaire. Ceux-ci ont été à mes yeux de véritables rayons de soleil dans des moments bien sombres. J'ai été heureuse d'apprendre que tant de choses s'arrangeaient au mieux pour vous et votre frère. Ainsi, vous ne subirez plus le courroux d'Emily qui se trouve exilée, et l'identité de votre mystérieux sauveur a été dévoilée ! On m'accuse souvent d'avoir une imagination excessive, mais il semble que cette fois-ci, elle ne m'ait pas trompée. Que je suis heureuse pour vous ! Il m'a l'air d'être fort aimable et très amusant. Néanmoins, vous avez raison, on ne peut être trop prudente. Il ne vous est pas interdit de le côtoyer un peu, ainsi peut-être pourrez-vous vous en faire une idée plus précise. Méfiez-vous cependant des bruits qui courent, si nombreux à Londres.

Je suis bien soulagée que vous n'ayez été fâchée de mon retard dans l'envoi de vos présents. Il y a à cela une explication que je n'ai voulu vous dévoiler alors, de crainte d'assombrir votre journée. J'ignore si la nouvelle vous a été communiquée par Père, mais Lord Henry m'a fait sa demande. Je vous avoue que j'ai eu l'imprudence de croire que ce penchant qu'il avait eu pour moi n'avait été que fugace. Après tout, tant de mois s'étaient écoulés sans qu'il ne se déclare ! J'avais imaginé qu'il ne s'agissait que d'une lubie passagère. Je m'étais lourdement trompée. Alors qu'il devait rester avec ses amis au moins trois mois, je me sentais en paix et ne craignais plus de le rencontrer à chaque heure du jour. Mais, un après-midi, alors que je rentrais de promenade, profitant des derniers beaux jours, je vis Père qui m'attendait au salon. Il me demanda de l'accompagner à son bureau, où il désirait s'entretenir avec moi. Il y avait tant de mystère dans son attitude qu'il excita ma curiosité. Je compris mieux lorsque j'aperçus la silhouette digne et droite de Lord Henry ! Avant que j'aie eu le temps de protester, je me trouvai prise au piège, seule dans la pièce avec lui.

Je savais très exactement ce qui allait se produire et pourtant je n'osais y croire. Oh, comme j'aurais souhaité ne jamais vivre cette scène ! Ce fut plus pénible encore que je l'avais imaginé. Il me dit alors que depuis longtemps, ses pensées étaient tournées vers moi. Que jusqu'à présent, il ne s'était décidé à ce déclarer à cause de l'infériorité de ma position sociale (réflexion qui m'offensa quelque peu, je l'avoue). Il ajouta avoir longuement consulté sa famille, puis ses plus proches amis, avant d'admettre que sa passion l'emportait sur les conventions. L'air affecté avec lequel il employa le terme de « passion » m'eût sans doute faire rire si les circonstances n'avaient pas été aussi dramatiques.

Car je sus, Constance, oui à cet instant je sus qu'il me serait impossible d'avoir un pareil homme pour époux. Je ne songeais plus à ma famille que j'allais contrarier, ni même à ce que nos voisins allaient dire d'une telle chose. Il semblait si certain de mon acceptation que je dus m'y prendre à plusieurs reprises avant de le convaincre que mon refus était bel et bien sincère et décidé. Puis, je quittai la pièce après l'avoir salué de manière maladroite et précipitée.

Je craignais la réaction de mon père et j'avais raison. Il tenta d'abord de comprendre mes motifs. Lorsqu'il réalisa que je ne comptais aucunement revenir sur ma décision, il exprima toute sa colère et sa déception. Depuis, c'est à peine s'il me parle. Moi, qui avait toujours été sa favorite, je ne peux désormais le croiser sans sentir son ressentiment envers moi. Quant à ma tante Brown, elle a eu une crise de nerfs en apprenant ce qui s'était passé. Depuis deux semaines, elle n'a plus quitté son lit et passe son temps en lamentations. Nous avons fait venir un médecin, et fort heureusement, son état n'est guère inquiétant. Que serais-je devenue, si en plus la santé de ma tante avait été mise en péril par ma faute ! Ma sœur aînée n'approuve pas non plus mon comportement. Dans sa dernière lettre, elle me supplie de revenir sur ma décision, me listant tous les avantages d'une telle union.

Il n'y a guère que la jeune Nora qui me montre encore de l'affection. Elle est presque mon seul réconfort, et mon unique compagne depuis quelques temps. La nouvelle s'étant répandue dans les environs, c'est à peine si j'ose m'aventurer dans le voisinage. Nos liens avec les Sheldon sont pour ainsi dire rompus. Lorsque nous avons croisé Lady Sheldon et son fils, à la sortie de l'office, ceux-ci se sont immédiatement détournés sans même un regard. Je dois supporter les chuchotements des uns et des autres, et j'ignore si je serai capable d'endurer ça bien longtemps.

Malgré tout cela, je ne parviens pas à regretter mon choix. L'attitude de Lord Henry depuis mon refus est si indigne de celle d'un gentleman que j'en éprouve d'autant moins de remord. Néanmoins, il est une personne dont la société me manque particulièrement.

Lorsque vous m'aviez fait part d'un certain penchant que j'aurais pour Mr Temple, j'avais pensé que je déteignais sur vous et que vous vous laissiez emporter par votre imagination. Et pourtant, comme vous aviez raison ! Je ne réalisais pas alors que mon affection pour cet homme grandissait de jour en jour. J'ai cru percevoir en lui certains signes d'attachement, sans parvenir cependant à le déterminer avec certitude. Malheureusement, une semaine après que j'aie refusé son cousin, il quitta le voisinage suite à une affaire urgente qui l'appelait. Il n'est revenu qu'il y a quelques jours, sans que je ne l'aie revu. Je crains qu'il ne blâme ma conduite.

Je vous prie de me pardonner pour cette lettre si dépourvue de gaieté. J'espère tout va au mieux pour vous.

Votre cousine affectionnée

Fanny

2 commentaires:

  1. Pauvre jeune demoiselle ! Mais elle a plus que bien fait !!! Quel cornichon cet Henry !

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  2. Tu as totalement raison! N'empêche, j'ai l'impression de la torturer la pauvre^^

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